Les cent jours suivant le dictionnaire de Casalis
mise à jour février 2016
Tome XI pages 983 à 985
Dans la nuit du 1er mars 1815 Napoléon s’enfuit de l’ile d’Elbe avec quelques soldats de la vieille garde. Il arriva avec audace à Golfe Juan (Yuan dans le texte) confiant dans le fait que sa seule présence suffirait à provoquer l’incendie de la révolte.
Le Prince de Monaco fut celui qui, venant de Paris pour rentrer dans ses Etats, apporta à Nice la triste nouvelle d’avoir parlé lui-même avec Napoléon près de Cannes.
Dans cette situation critique le Commandant d’Osasco prit immédiatement toutes les mesures de précaution pour la sécurité de la frontière, bien qu’il n’ait eu à sa disposition qu’une faible garnison d’environ mille hommes. Il envoya quelques officiers sur les traces de Napoléon pour deviner sa marche et ses desseins et il sut rapidement que sans obstacle il était arrivé à Paris.
Deux mois se passèrent dans l’attente de ce qui arriverait. La France était toute en armes et la grande masse des forces alliées s’avançait sur le Rhin et la Belgique pour assurer de façon définitive le triomphe de la légitimité.
Pendant ce temps, l’orage grondait, pas loin de Nice
Le drapeau tricolore flottait sur les bastions d’Antibes (voir note 1). Dans cette Place se rassemblaient les hommes les plus exaltés de Provence. Le Maréchal Brune dont le quartier général était à Avignon y organisa une armée révolutionnaire, qui manifestait les mêmes dispositions que celles de 1792, et menaçait d’une invasion imminente.
Le courageux Commandant d’Osasco ne s’effraya pas; il arma en hâte les milices, il disposa une bonne garnison dans la Place de Monaco, il prépara la construction et l’armement de plusieurs batteries sur le chemin du Var.
Pendant qu’il essayait d’obtenir de prompts renforts, il imaginait astucieusement des stratagèmes guerriers pour tenir en respect le maréchal Brune. Chaque soir sur son ordre on allumait de grands feux le long des collines qui dominaient le lit du Var pour faire croire que tous les habitants étaient en armes, résolus à se défendre. Il saisit l‘occasion qu’un vaisseau anglais commandé par le Capitaine Tomson arrivait au port de Villefranche; il obtint de le retenir en escale. Il fit subitement armer deux galères qui patrouillant de façon continue le long du littoral maritime rendaient impossible toute surprise du côté de la mer. Finalement rien ne fut oublié pour espionner les marches du Maréchal Brune et pour assurer un temps la sécurité intérieure
Bien qu’octogénaire, et alors en mauvaise santé, il visitait régulièrement tous les postes militaires et montrait continuellement une merveilleuse fermeté d’âme.
Il fut heureux de voir renforcée la garnison par l’arrivée d’un bataillon du régiment provincial de Nice et un autre du régiment d’Aoste. Mais ce secours n’était pas suffisant pour arrêter les français, s’ils avaient entrepris de passer le Var, parce que le nombre des troupes subalpines n’était que de deux mille cinq cents hommes pendant que Brune était à la tête de six mille soldats.
Le soir du 20 juillet le Commandant d’Osasco conscient que l’ennemi avait délibéré de marcher sur Nice, il vit qu’il était urgent d'imaginer quelque astuce.
A l’aube du jour suivant, il ordonna à trois cents travailleurs de dégager le passage du pont, comme si lui-même avait résolu de la franchir. Il fit dans le même temps publier un avis pour qu’on s’apprête à loger et ravitailler six mille autrichiens dont il affirmait l’arrivée prochaine, et afin de donner un plus grand crédit à ce qu’il assurait il se rendit l’après-midi aux limites des deux territoires accompagné par le Capitaine Tomson et par deux officiers allemands, que le général Geppert, pour accéder à ses demandes, lui avait envoyés de Cuneo.
Colà en face des français fit semblant de combiner sur les lieux son plan d’offensive. Ceux-ci et d’autres stratagèmes lui réussirent à merveille. Brune pensant être attaqué, s’occupa de sa propre défense. Il se tint en observation pendant deux jours. Le soir du 23 juillet (voir note 2) un parlementaire français vint proposer un armistice que le Commandant d‘Osasco accepta sous la condition expresse que les troupes de Brune évacueraient, comme en effet elles évacuèrent ensuite, le village de Saint Laurent et que les troupes royales abandonneraient, comme de même elles abandonnèrent la ligne des collines, d’où cette position est dominée.
Aussitôt que la Cour de Turin sut les conditions de l’armistice, doutant qu’il ne puisse en résulter des obstacles à la marche des impériaux, elle donna l’ordre de le rompre instantanément. Les troupes savoyardes s’avancèrent donc sous les remparts d’Antibes et firent mouvement pour cantonner dans le district de Grasse, et les colonnes autrichiennes rejoignirent le Var, combinant leur mouvement avec le contingent de l’armée sarde qui débouchant par la Savoie força les défenses de Grenoble.
Après quelque évènements qu’il n’est pas utile de rapporter, le second Traité de Paris fit cesser entièrement les hostilités. Les habitants de Nice applaudirent le passage des troupes subalpines qui rentraient au Piémont par les Alpes Maritimes.
Sous les lois paternelles de l’Auguste Maison de Savoie, la fin de 1815 se présenta comme l’aurore d’une prospérité durable et comme la fin des nuages politiques.
Notes
Note 1 – Dans un premier temps la ville d’Antibes avait refusé de se rallier à Napoléon
Note 2 – Selon Chabert Plancheur page 75 (), l’armistice aurait été conclu le 27 juillet entre le Général Sliwarich Commandant de la Place d’Antibes et gouverneur de l’avant-garde du Var et le Commandant d’Osasco.
La bataille de Waterloo avait eu lieu le 18 juin.
Le maréchal Brune fut assassiné à Avignon peu après
Bibliographie
Dizionario geografico storico statistico commerciale compilato per cura del Professore e Dottore di Belle Lettere
Gioffredo Casalis Cavaliere dell’ordine de SS Maurizio e Lazzaro
Opera molto utile agli impiegati nei pubblici e private uffizi a tutte le persone applicate al foro alla milizia al commercio e singolarmente agli amatori delle cose patrie
Bibliothèque municipale de Nice Tome XI B 8143 – date 1843
Chabert Plancheur – Histoire d’Antibes - éditée à Nice 1866