Mise à jour janvier 2015
A la fin du XIXème siècle et au début du XXème de nombreuses routes ont été ouvertes dans les Alpes Maritimes soit par les militaires soit par les civils, et ceux qui ont participé à ces chantiers se sont souvent considérés comme les continuateurs des romains.
Ils ont gravé parfois des textes en latin et à d’autres endroits ont sculpté des bas reliefs qui ressemblent à des bustes de soldats casqués qui font penser aux romains
On peut noter la culture latine des militaires qui ont gravé ces textes.
Inscription latine de la route de La Tour sur Tinée 06710 aux granges de La Brasque
Cette inscription a été décrite par Jean Laffitte (). Le texte est le suivant :
ANNO REIPUBLICAE CXIX METTO CONSULE SALUS LETHEUX POUTRIN CREUTZER( ?) CENTURIONES W( ?)IART DENIT DECUR APERUERUNT VIAM LEG XXIII MAN I III |
L’AN 119 DE LA REPUBLIQUE
METTO ETANT CONSUL
SALUS LETHEUX POUTRIN CREUTZER
CENTURIONS
WIART DENIT DECUR(ION)
OUVRIRENT
CETTE ROUTE LA LEG(IO) XXIII
MAN(IPULES) I III
Le fait de compter les années à partir de l’an I de la République (1792), ce qui correspond à 1912 ou 1913, est à rapprocher du compte des années de la gravure de Piene à partir de l’an I du fascisme.
Au sujet de LEG XXIII, Marc Endinger qui s’est particulièrement intéressé aux unités militaires qui sont passées par les divers sites des Alpes Maritimes notamment, a fait la remarque suivante, si l’on essaie d’établir une correspondance avec le 23ème bataillon de chasseurs alpins, 1ère et 3ème compagnie :
« Le 23ème BCA était à GAP (05) jusqu'en 1929 date à laquelle il a été dissous. Il a été recréé en 1939 lors de la mobilisation. Je ne pense pas qu'il soit passé aux Granges avant 1929 car il dépendait du XIVème Corps d'Armée dont la limite Sud était Restefond. Si cette inscription provient d'éléments du 23ème BCA elle ne pourrait dater que de mi-septembre 1939 à octobre 1939 date à laquelle le Bataillon est parti pour le Nord-Est (en bref, vu la formation militaire à donner à des réservistes cela me semble un peu court pour effectuer cette gravure). Il faut peut-être chercher une autre origine... »
On peut aussi se demander cependant si des unités du XIVème corps ont pu en 1912-1913 exceptionnellement venir aux Granges de la Brasque
Gravure du col de Braus et de Rocca Taillada
Photos Louis Carlot, Jacky Sarale
Elle se trouve au départ de la route militaire qui mène au col des Banquettes sur un rocher à gauche. |
Le texte latin est « FERRO ET IGNE APERUERUNT / VELITES / FERRO ET IGNE TENEBUNT/1895 ». Elle est mentionnée dans la brochure du CAUE () page 35 de 1993 qui se réfère à Henri Sappia () page 282.
En dessous sont mentionnés deux noms, à gauche Maurin P et en dessous 24 et une fleur d’edelweiss probablement et à droite Barbery 24 avec des fleurs également.
Le 24 se réfère au 24ème bataillon de chasseurs alpins qui était stationné à Villefranche sur Mer.
La traduction est la suivante : « les soldats ouvrirent (cette route) par le fer et le feu, ils la tiendront par le fer et le feu »
Sculpture du pont de l’Infernet
Sculpture de la Bollène Vésubie
Note de marc Endinger
Il s'agit du symbole du 4° Régiment du Génie qui était à cette époque basé à Grenoble.
Ce régiment était spécialisé "Montagne" et en particulier dans la construction de téléphériques. Il dépendait du XIV° Corps d'Armée de Lyon.
Le 7° Régiment du Génie lui étant en Avignon et dépendant du XV° CA de Marseille avait comme spécialisation celle de Pontonniers.
Le 28° Régiment du Génie lui était à Montpellier et dépendait du XVI° CA et avait comme spécialité les transmissions.
Tous trois pouvaient intervenir dans le département des Alpes Maritimes suivant leur spécialité mais cette région dépendant du XV° CA, le 7 a toujours évolué dans l’arrière-pays niçois pour tous les travaux de terrassements (routes et fortifications de campagne en particulier) mais de petits détachements des autres venaient dans la région ponctuellement.
La présence du 4° Génie pour la station de pompage de Flaut (dossier en préparation) n’était pas étonnante car ses personnels étaient entre autres des électro-mécaniciens.
Pour info l'ouvrage de Flaut a été construit par l'entreprise civile BORIE (comme tous les gros ouvrages Maginot) sous la direction de techniciens du Génie entre le 27 novembre 1931 et le 20 mars 1935.
L'insigne qui est dans le mur face au pont qui traverse la rivière la Planchette pour aller à Flaut est la "cuirasse et pot en tête" et est l'insigne commun à tous les régiments du Génie. Elle peut se voir à plusieurs endroits dans le département en particulier sur des ponts ou des fortifications.
La devise du Génie "souvent construire, parfois détruire" peut encore se voir au niveau du casernement du col de la Moutière entre les Alpes Maritimes et les Alpes de Haute Provence (Tinée / Ubaye)
Bibliographie
Raybaud Claude – Les fortifications françaises et italiennes dans les Alpes Maritimes – éditions Equlibres 2002
Sculpture de Pierre Pointue
http://www.planete-tp.com/article.php3?id_article=1157
Ce sont eux qui ont construit la grande majorité des ouvrages d'art et des routes militaires (souvent au niveau de l'encadrement car la main d'oeuvre provenait des autres troupes).
Sa spécialité principale (avant 1940) était les pontonniers (franchissement de rivières).
Il a été dissous dans les années 1980 »
Il se peut que les militaires aient eu à leur disposition un moule en creux pour certains de ces bas reliefs.
D’après Marc Endinger, il n’est pas certain que ces sculptures fassent référence aux romains, l'insigne de béret est porté depuis 1775 et s'appelle "la cuirasse et le pot en tête".
Le corps du Génie a été organisé par Vauban. L’uniforme du XVIIIème siècle a été défini par une ordonnance de 1758, mais l’uniforme décrit dans cette ordonnance royale ne mentionnait pas de cuirasse. Cependant on peut lire par ailleurs que la protection par une cuirasse aurait été instituée par Vauban.
En ce qui concerne le type de casque que l’on peut observer sur les bas reliefs, il ressemble au casque romain par la forme et notamment la protection des oreilles, et à celui des hoplites grecs par la crête qui le surmonte.
En conclusion on peut penser que tant au moment de la conception du dessin caractéristique de l’Arme du Génie, que plus tard sur le terrain, la référence à l’Antiquité a été recherchée par les soldats du Génie
Bibliographie
CAUE –Real Strada – cahier des Alpes Maritimes N° 10- 1993
Laffitte Jean - Quelques inscriptions modernes et contemporaines particulières relevées dans les Alpes Maritimes. Mémoires de l’IPAAM 2006
Sappia Henri – Nice Historique 1900