Ce dossier reprend des études antérieures qui s'étaient intéressées surtout aux bornes. Le présent document essaie de faire une critique objective du tracé et des hypothèses antérieures et de proposer une localisation aussi précise que possible des bornes en fonction des descriptions anciennes et des mesures qui ont été faites sur la cadastre et après avoir suivi à pied le trajet hypothétique. Le Professeur Arnaud (2) a fait une étude sur ce qu'il faut entendre par Via Julia et Via Aurelia.
Des documents mentionnés dans la bibliographie ont été étudiés en plus de ceux qui sont nommés dans le texte.
Quand il est écrit « la borne N° 604 » par exemple, c'est pour situer plus commodément un point car selon les cas il pouvait y avoir au même endroit plusieurs bornes d'époques différentes.
Le choix de commencer la description à partir de la Turbie, en allant vers l'Est et vers l'Ouest est dû au fait que c'est autour de ce village que se trouvent les témoignages fixes (emplacements des bornes) servant de base à l'étude.
Selon Annie Arnaud (2) page 26, la voie aurait été bornée et pavée en 13 avant JC.
Cette partie de voie est presque entièrement conservée et s'appelle successivement en partant du village, chemin de Fontvieille, chemin de Saint Roch, puis voie romaine. Voir plans N° 1à 5.
André Franco issu d'une très ancienne famille turbiasque (20) se souvient que dans les années 1940 le pavage était encore visible par endroits aux abords est du village. Ce pavage n'était probablement pas le pavage romain, car il y a eu des restaurations successives en 2000 ans. Actuellement cette route est goudronnée et sert à la desserte locale.
Le point de départ de cette description est fixé au milliaire 604.Tout ce qui concerne ce milliaire a été étudié par Pierre Bodard (9) page 143. En annexe est donnée la description de Mommsen N° 8100. La distance de 300 pas à partir de La Turbie n'est pas exploitable car le point de référence n'est pas indiqué. S'il s'agit du carrefour entre la route de Cap d'Ail de la Via Julia et de la rue Comte de Cessole, toutes voies anciennes, ce chiffre est plausible.
Philippe Casimir (16) puis Lucien Barbera, ont affirmé qu'il se trouvait en contrebas du cours Albert 1er. Le socle et un moulage en plâtre sont conservés au musée de La Turbie. Le canal cité page 143 est visible et l'emplacement primitif probable peut donc être noté sur le plan de façon assez précise un peu en amont de l'ancien pont sous le chemin de fer de la crémaillère.
Camille Germain (21) précise que cette borne était encastrée dans la maçonnerie de l'ancien poste de la gabelle du sel.
L'ancienne chapelle Saint Bernard devait se trouver près de la voie. Cette chapelle aurait été détruite en 1822. Elle faisait partie des quatre chapelles de La Turbie pour lesquelles étaient nommés des recteurs à raison de deux recteurs par chapelle au moment du renouvellement annuel du bayle, équivalent de maire, des syndics, du secrétaire, des sacristains, de "l'exacteur" équivalent du receveur municipal et des conseillers. L'élection du 27 Décembre 1732 est décrite dans le livre de André Franco (20) page 121 à 124.Trois des quatre chapelles situées à proximité de la Via Julia à savoir les chapelles Saint Bernard, Saint Roch, Saint Pierre étaient citées en 1732. La chapelle Sainte Catherine n'était pas citée. Notons entre parenthèses que si plusieurs chapelles anciennes sont mentionnées, ce n'est pas un indice formel du passage de la voie à proximité mais seulement une présomption.
La voie traverse le quartier de Fontvieille où se trouve une fontaine antique en contrebas à 270 m à l'est de la borne 604. Un lavoir a été construit à côté. Du fait de son emplacement en contre bas de la voie, l'abreuvage des animaux, notamment attelés, n'était pas très pratique. On peut se demander si à l'origine, et si la fontaine est elle-même romaine, la voie passait devant la fontaine. Elle se poursuit par le chemin de Saint Roch et n'a pas été endommagée au moment de la construction du chemin de fer de la crémaillère de Monaco à La Turbie à la fin du siècle dernier.
D'anciennes gravures font bien apparaître la Grande Corniche et en contrebas, la voie romaine avant la construction du chemin de fer à crémaillère et l'urbanisation.
Au bout du chemin de Saint Roch se trouve la chapelle Saint Roch édifiée au Moyen Age, dédiée à Saint Roch après la peste de 1631 et restaurée en 1940 sous les auspices de l'abbé Matt curé de La Turbie. Des restaurations ont eu lieu aussi en 1905. (A.D. 084/ 09 M 006).
Le milliaire 603 a été transféré au musée du trophée en 1930 par Jules Formigé selon Pierre Bodard (9) page 144. Malheureusement aucune trace n'est visible sur place et à l'époque aucun témoignage n'a marqué l'endroit d'où avait été enlevée la borne.
En annexe sont données les indications du chanoine Lanciarez extraites du corpus de Mommsen N° 8099.
Une petite photo ancienne prise avant le déplacement est visible dans le musée du trophée au fond à gauche, dans un cadre avec d'autres photos de bornes. Il est noté que cette photo a été prise au quartier Anghissa.
Notons que le quartier Anghissa ou Languissa s'étendait lors de l'établissement du cadastre de Germinal an XII jusqu'à Fontdivine.
En prenant une longueur de 1478 m comme valeur du mille romain et en prenant pour point de départ l'emplacement supposé de la borne 604, la position de la borne 603 serait à 40 mètres à peu près à l'est du croisement avec le CD 53 La Turbie à Beausoleil à peu près au droit du numéro 342 du chemin romain moderne soit à 380 mètres environ à l'est de la chapelle Saint Roch.
Mommsen (28) N° 8099 cite le chanoine Lanciarez qui évalue la position de ce milliaire à un quart d'heure de la Turbie, ce qui est logique.
Près de la chapelle Saint Roch se trouve le carrefour avec le chemin d'accès aux carrières romaines et au gibet qui a peut-être donné son nom au quartier "l'Anguissa".
Les vestiges trouvés dans les carrières font l'objet de divers articles notamment de Georges Brétaudeau dans le numéro XXXII des mémoires de l'IPAAM.
La voie continue goudronnée jusqu'à la fontaine de Fontdivine à l'endroit où elle traverse la Moyenne Corniche. Avant d'arriver à Fontdivine on trouve quatre virages en épingle à cheveux car la pente à cet endroit est très raide. Du virage No 1 au virage No 3 existait anciennement un chemin direct mentionné sur le cadastre de Germinal et sur le cadastre section AM Beausoleil 1976. Actuellement au pied d'un pilonne électrique situé à l'extérieur de l'épingle No 1 on distingue une amorce de chemin mais les riverains se sont appropriés partiellement l'emprise de cette voie désaffectée. Au cas où ce chemin aurait constitué l'emprise ancienne de la voie, la création ultérieure du virage No 2 aurait permis un allongement de 200 m environ pour adoucir la pente générale du tracé. Cette question sera reprise plus loin au sujet de la position de la borne 601.
L'hypothèse de tracé a été reportée sur un fond de plan de l'ancien cadastre. Voir plan ci-joint.
Une autre interprétation du nom Languissa pourrait être l'angoisse d'avoir à parcourir un tronçon aussi difficile surtout avec des attelages.
En contrebas de la Moyenne Corniche au carrefour de Fontdivine c'est à dire peu avant l'embranchement de la route qui remonte vers l'autoroute au Vista Palace Hôtel dite route d'Agerbol, une plaque signale le chemin romain. Voir plans N° 6 à 17.
D'après le calcul effectué sur la cadastre et en prenant l'hypothèse du trajet direct entre l'épingle à cheveux N°1 et la N°3, la borne 602 se serait trouvée à peu près à l'endroit où le chemin dit romain actuel s'écarte de la Moyenne Corniche, soit à 200m environ à l'est du débouché de la route d'Agerbol sur la Moyenne Corniche. En fait pour conserver une desserte locale une voie a été créée juste en contrebas de la Moyenne Corniche dénommée chemin romain, mais la hauteur des murs de soutènement
de cette voie à certains endroits montre qu'il s'agit d'un ouvrage moderne et laisse supposer que l'assiette de la voie antique était en réalité à l'emplacement même de la Moyenne Corniche.
Cependant sur quelques centaines de mètres au droit du tunnel la voie dénommée " chemin romain" est bien vraisemblablement sur l'emplacement de la voie antique.
Le Chanoine Baudoin (5) parle dans son ouvrage d'un mur perpendiculaire à la voie qui aurait servi de frontière protégé par des tours (voir ci dessous).
Il indique : "la voie aurélienne quitte la route (il s'agit de la Moyenne Corniche) et s'accroche à la paroi assez abrupte du vallon de la Veya ou de l'Arma (actuellement vallon de Saint Roman), frontière est entre la France et Monaco, sous le Ricard, j'ai vu là des ornières profondes de 10 à 20 cm dans les dalles de la voie. Le danger du passage entre la roche et le précipice explique cette profondeur car il ne fallait pas que les roues des chars quittent ces ornières sinon c'était la chute dans le vallon." Il est dommage que nous n'ayons pas de document sur ces ornières car ce point a fait l'objet de nombreuses études. Voir à la fin.
Notons que cette frontière était celle d'avant 1860.
Le chanoine Lanciarez (26) indique que la borne 601 se trouvait à 170 pas à l'ouest du croisement de la Via Julia et de la route de Monaco (actuelle avenue de Varavilla). En annexe est donné le texte du chanoine Lanciarez extrait du corpus de Theodorus Mommsen N° 8094 et N° 8095 et la photocopie de ses mémoires relative à cette borne.
Si l'on suppose que le virage N°2 avant Fontdivine cité plus haut a été créé après le bornage de la voie romaine (à une époque inconnue), le calcul des distances confirme à peu près la mesure du chanoine Lanciarez.
La position exacte du carrefour de Bon Voyage à Roquebrune est très difficile à définir car les routes ne se croisent pas à angle droit mais en croix de Saint André très fermée.
On peut supposer que le carrefour de Bon Voyage était un des deux points de passage possibles pour les marbres de Carrare utilisés pour le trophée d'Auguste qui devaient être livrés par mer jusqu'à Monaco, les chemins tracés dans le vallon des Révoires ne pouvant servir à des transports lourds par chariot. La description de la voie de Cap d'Ail à La Turbie par l'ouest de la Tête de Chien fait l'objet d'une étude particulière.
Camille Germain (21) donne le plan du mur romain formant frontière au quartier des Veilles au droit du carrefour de Bon Voyage. Si un morceau de ce mur existe encore il se trouve à l'intérieur de propriétés privées. Ce mur fait l'objet d'un dossier particulier.
A partir de la chapelle de Bon Voyage en allant vers l'est la route actuelle (Avenue de Bon Voyage) reprend certainement l'emprise de la voie antique.
La voie devait traverser la Basse Corniche et se poursuivre partiellement par ce qui est à l'heure actuelle l'avenue Georges Drin.
Camille Germain (21) a dressé le plan du pont antique sur le Ramingao et d'après ce document la Via Julia devait traverser ce vallon en aval du pont actuel. Le tracé sur le bas de l'avenue Georges Drin et le début de l'avenue Villarem pourrait dans ce cas ne dater que du XVIIIème siècle. Un dossier particulier est consacré à ce pont. Le Grand Chemin de Monaco à Menton a fait l'objet d'une étude particulière de la part de Thérèse Ghizzi et Robert Fillon (22).
Il était en effet plus facile de traverser le vallon de Ramingao plus en aval que ne le fait la Basse Corniche actuelle. D'après le calcul, la borne 600 devait se trouver Avenue Villarem un peu à l'Est de la place Marius Otto, en prenant comme bonne la position donnée par le chanoine Lanciarez pour la borne 601.
Camille Germain (21) indique par ailleurs " ...tronçon de borne trouvé en 1868 par les ouvriers du chemin de fer sur l'emplacement de la station de Cabbé Roquebrune. Il y avait été entraîné par les eaux du petit torrent de Vallongue et ensuite couvert par des terres d'alluvion; le bas de cette borne manque et avec elle le numéro du milliaire. Sa position indique cependant pourtant qu'elle devait porter le numéro 600".
Le calcul de la position de la borne 600 recoupe la trouvaille signalée par Germain. L'étude du plan de 1814 semble indiquer que lors de l'exécution du grand chemin de Monaco à Menton le tracé antique situé quelques mètres en contrebas de la traversée du vallon était déjà abandonné.
Un débroussaillage du vallon demandé au Maire de Roquebrune a été effectué en Novembre 2001 et a permis de retrouver l'ouvrage antique remanié à plusieurs reprises. Voir photo. Voir plus loin note sur ce pont.
Signalons en ce qui concerne le secteur du vallon de l'Arme que Mademoiselle Mouchot y a fait l'acquisition pour le musée de Cimiez d'objets d'époque romaine trouvés dans cette zone ce qui témoigne de la présence d'un établissement romain dans les parages, une ferme probablement.
Il est vraisemblable que les avenues Villarem, Pierre Curie, Paul Doumer correspondent sensiblement au tracé de l'ancienne voie jusqu'au monument de Lumone.
La borne 599 suivant la même hypothèse devait ainsi se trouver un peu à l'ouest du monument de Lumone, à une cinquantaine de mètres peut-être.
Le monument de Lumone a été décrit dans de nombreux ouvrages auxquels on peut se reporter
A l'est du monument le tracé pouvait emprunter le trajet suivant: chemin de Fontanouille qui est dénommé sur le cadastre: ancienne voie romaine, au bas duquel se trouve un beau puits couvert ancien, (photo) l'avenue de la Paix, l'avenue de Profondeville. Voir plans N° 18 à 20.
Le chanoine Baudoin (5) 2ème partie III page 4, donne le tracé suivant de Roquebrune à la frontière : « Chemin de Mérillot (rue Paul Morillot?) au nord de la voie ferrée, chapelle de Carnolès, rue Partounaux, avenue Félix Faure, rue Saint Michel, rue Longue, porte Saint Julien, l'Hopital, passe devant la chapelle Saint Vincent, chapelle Sainte Anne, suit la voie ferrée, franchit le vallon de Garavan, emprunte la rue qui mène à la gare de Garavan, contourne la villa Louise, traverse le clos du Peyronnet, raccourci Paraisa, petit pont sous la voie ferrée, passe au pied de la Villa Serena sur l'avenue Reine Astrid. » En fait il donnait le tracé en allant vers l'ouest mais ceci est sans importance pour ce qui nous préoccupe.
L'examen du plan d'assemblage du cadastre terminé le 1er germinal an XII montre que la voie existante à l'époque s'écartait de l'avenue de Profondeville pour former une grande courbe vers le nord afin sans doute de ne pas franchir le ruisseau de Gorbio trop près de son embouchure. Ce secteur a été bouleversé par la création de la voie ferrée mais il est possible que la rue Paul Albini soit sur le tracé de la voie antique jusqu'au carrefour avec la rue Paul Morillot, contournant ainsi par le nord le château de Carnolès.
Sur les bases de calcul énoncées plus haut, et à partir du tracé possible décrit ci-dessus, la borne 598 se serait trouvée à peu près au passage de la rivière de Gorbio.
L'examen du plan d'assemblage napoléonien de date inconnue mais vraisemblablement de Germinal an XII comme celui de Roquebrune semble indiquer que la rue Partounaux correspond plutôt à l'ancienne route de l'Annonciade, car en rive droite du Carrei on ne trouve pas de voie ancienne en face de la rue Partounaux pouvant constituer l'emprise de la voie antique. Voir plans N° 21 à 34.
Ceci contredit l'hypothèse du chanoine Baudoin.
Par ailleurs, et ceci n'est qu'un indice, l'entrée de la chapelle Saint Roch donne sur l'avenue Félix Faure et son axe est perpendiculaire à cette voie.
De la chapelle Saint Roch place Saint Roch et jusqu'à la chapelle Sainte Anne le tracé suggéré par le chanoine Baudoin: avenue Félix Faure, rue Saint Michel, rue Longue, porte Saint Julien, l'Hopital, chapelle Saint Vincent est vraisemblable.
La chapelle Saint Vincent pourrait être à l'emplacement approximatif de la borne 596.
Entre la chapelle Sainte Anne et le passage à niveau près de la frontière, deux problèmes se posent.
Tout d'abord il parait étonnant que lors de la construction de la voie ferrée la voie antique n'ait pas été maintenue en déplaçant légèrement son emprise si nécessaire car entre la vieille ville et la chapelle Sainte Anne elle était fréquentée au XIXème siècle et elle l'est encore. Or, si des tronçons de voies peuvent être parcourus avec des écarts de niveau importants et un manque de rectitude dans le tracé, il y a aussi des propriétés privées qui interrompent la continuité.
Sur le cadastre napoléonien on distingue un passage un peu à l'ouest de la nationale 7
Ce tracé a été probablement abandonné après la construction de la nationale 7.
La borne 595 en mesurant les longueurs sur le cadastre actuel aurait pu se situer un peu à l'ouest du passage à niveau si la voie passait à cet endroit.
Au delà du passage à niveau un chemin longe la voie ferrée et est nommé sur le plan cadastral Menton section AS renouvelé pour 1971: "voie romaine" sur plus de cinquante mètres mais il y a lieu d'éclaircir la question du tracé au passage de la frontière.
Lors de la construction de la villa Maria Séréna, le tracé de la voie a t-il été abandonné au profit des jardins de la villa suivant le tracé proposé par le chanoine Baudoin? Il faut se reporter au cadastre d'avant la construction de la voie ferrée pour résoudre cette question. Il semble en effet que contrairement à son hypothèse la voie suivait peut-être le tracé de la voie ferrée et traversait le vallon Saint Louis sous le pont de chemin de fer ou légèrement an amont mais que reste-t'il après les travaux de la voie ferrée et les travaux de défense de la frontière?
Sur le plan d'assemblage napoléonien on voit que la route du bord de mer était ouverte an aval de la villa Maria Séréna car la voie romaine présumée était dénommée "ancienne route de Vintimille". En ce qui concerne le franchissement du ravin de Saint Louis on voit sur le plan napoléonien le coude vers l'amont et vers l'aval au droit du vallon. Les restes de mur ou de pont ont été vraisemblablement détruits au moment de l'exécution de la voie ferrée.
Mais en Novembre 2010 Jean Louis Renteux a publié dans la revue de la SAHM 3 de la rue Longue à Menton consultable boutique du Patrimoine rue St-Michel à coté de la place aux Herbes, un article très documenté sur la traversée de Menton par la Via Julia en s’appuyant sur de nombreuse cartes et documents anciens. Il en ressort que jusqu’au droit de la chapelle Saint Laurent son hypothèse de tracé correspond à celui de la présente étude, en contradiction avec les études du chanoine Baudoin et de l’équipe du Professeur Arnaud, mais qu’à l’est de la dite chapelle (moderne) la voie continuait à suivre le bord de mer jusqu’aux Balsi Rossi.
La mention « voie romaine » au droit du passage à niveau est donc un mystère car aucun procès verbal du Conseil Municipal de Menton n’a été retrouvé à ce jour ou aucun sondage pour justifier cette plaque
Cet épisode a également été étudié de façon détaillée par Jean Louis Renteux dans la même revue.
Au delà de la frontière
Verneau (31), indique qu'au droit des grottes de Baoussé Roussé " les rochers abritant ces grottes n'étaient séparés de la mer que par un étroit espace sur lequel les romains avaient construit la voie auréliana". En Italie on parle de Via Julia mais le plus souvent de Via Aurelia et parfois simplement de voie romaine. Les tronçons de voie encore existants dans la plaine de Latte entre la frontière et Vintimille sont prudemment dénommés « via romana ».
Un plan figurant dans le document du chanoine Baudoin (5) montre un tracé en pointillé de la voie au droit du Baoussé Roussé.
Dans le fond Germain (21) figure une photo prise au Baoussé Roussé depuis l'Italie avec un pont qui ne serait pas romain mais ce document est peu clair.
Peu après l'immeuble qui se trouve après la frontière en bord de mer et juste avant la plage privée une plaque de calcaire marbré donne l'impression d'avoir été taillée pour constituer l'assise de la voie à un passage obligé en pied de talus mais aucune trace d'ornière n'est visible. Peut-être les tempêtes d'hiver ont elles tout fait disparaître avec le temps.
Une gravure ancienne, du XVIIème siècle (atlante Vinzoniano), (voir photo) montre la tour des Balzi Rossi, avec les falaises et le chemin en contrebas. Côté français est notée une chapelle saint Louis qui a probablement donné son nom au quartier. Côté italien on voit un pont pour franchir une crique et dans le cartouche sont données ses dimensions. Ce pont était-il romain ou reconstruit sur des bases romaines ? Il était en tout cas très exposé aux coups de mer, mais côté falaise l'espace est très étroit et le terrain sujet à éboulements. Sur une photo ancienne (Voir photo) on voit aussi des restes de murs et une note disant qu'il s'agissait de restes de la voie romaine.
Entre les falaises des Balsi Rossi et l'Ouest de la villa Hanbury la voie a été probablement détruite par l'exécution de la voie ferrée et la route du bord de mer.
La voie traverse le bas des jardins Hanbury à La Mortola en Italie et on peut la suivre sur une distance de 900 mètres environ. Au droit de la propriété elle est bordée par un mur de chaque côté. Une plaque a été apposée à l'Est du petit pont qui enjambe la voie indiquant le nom de personnages célèbres qui ont parcouru ce chemin.
Cette plaque en marbre écrite en anglais de dimensions 60x80 cm environ a été apposée par Lord Hanbury au XIXème siècle.
En haut à gauche un extrait du vers de Dante : " Tra Lerice et Turbia. romita via ", à droite un autre texte, et en dessous :
VIA AVRELIA
POPE INNOCENT IV 13..
CATHERINE OF SIENA JUNE 1376
NICOLO MACHIAVELLI MAY 1511
CHARLES V EMPEROR NOVEMBER 1538
NAPOLEON BONAPARTE 3 AVRIL 1796
La borne 594 pouvait se trouver à l'Ouest du jardin Hanbury avant la Mortola.
Dans la plaine de Latte on peut suivre la voie sur 1300 mètres environ. Il y a un hiatus avec le tronçon qui traverse les jardins Hanbury dû vraisemblablement à la construction de la voie ferrée. Dans la plaine de Latte, le tronçon existant dénommé Via Romana est parallèle à la voie ferrée tout d'abord légèrement au Sud jusqu'au pont piétonnier sur la voie ferrée et on peut l'atteindre par la Via del Ricovero. A 50 mètres à l'Ouest de l'hôtel Caletta un portail ancien perpendiculaire à la voie barre celle-ci. Voir photo. Ce portail, sur le fronton duquel est inscrit la mention « Honesto Otto », donne accès à la propriété Biancheri. A l'intérieur de cette propriété se trouve une allée dans l'axe de la Via Romana avec une pergola qui se prolonge sur plusieurs dizaines de mètres. Il se pourrait que cette allée soit sur l'emprise de la voie antique.
En suivant la voie vers l'Est on passe au droit de propriétés anciennes notamment côté mer on peut voir le portail de la propriété Orengo daté de 1687. On passe la rivière à gué comme probablement dans l'antiquité. Selon Rinaldo Luccardini (27) pages 174 à 176, des sondages ont été effectués dans les années 1970. Il serait intéressant d'en connaître l'emplacement exact. Ce tronçon de voie est interrompu au bout de 800 mètres environ par un pont au dessus de la voie ferrée à l'Est de la gare. La voie aurait eu 2.20m de large avec des bordures de 50 cm mais ce calibrage plausible a pu être modifié depuis l'antiquité. Corradi (18) ne donne pas de détail sur ce tronçon.
Selon don Allaria Olivieri de l'évêché de Vintimille, une chapelle dénommée Sainte Anne se trouvait dans la propriété Biancheri. Elle a été détruite par l'érosion marine mais par mer calme on en voit encore les fondations selon lui. Son érection date de 1645 par autorisation de l'évêque Mauro Promontorio.
.Le Comte Galleani de Vintimille a bien voulu apporter les précisions suivantes :
« La cappella di S. Anna fu acquistata insieme alla villa Honesto Hotio il 10 agosto 1671 dal Magnifico Roberto Galleani (figlio di Paolo I°) che comperò questa proprietà dal canonico Bernardino Viale. Anche Roberto Galleani fu canonico della Cattedrale di Ventimiglia e poi protonotario e nunzio apostolico oltre che esattore delle decime papali. La Villa, con la sua cappella in riva al mare(soggetta al servizio pubblico e la cui manutenzione era a spese del proprietario), fu quindi, per lungo tempo, la residenza estiva di uomini religiosi (Bernardino Viale e poi Roberto Galleani) per poi entrare a far parte, alla morte di Roberto Galleani dei beni della mia famiglia.
Durante la rivoluzione francese le scorrerie dei soldati nella piana di Latte la ridussero quasi in rovina per cui alla morte del mio trisavolo, il Conte Nicola Maria II° Galleani di Ventimiglia, fu venduta all'asta (1850) con altri terreni incolti per motivi di suddivisione ereditaria tra i discendenti e non, come altri autori sostengono, per debiti.
La proprietà fu acquistata da un certo Sismondini di Nizza per conto, pare, di una famiglia di imprenditori nizzardi: i Massa. Successivamente fu acquistata dai Biancheri, discendenti peraltro da una Galleani, che ancora oggi ne sono proprietari.
La cappella, così come parte della casa rurale che faceva parte della proprietà, fu distrutta dall'erosione del mare qualche anno prima del 1938. »
Des contacts avec la société des chemins de fer italiens ont été pris pour voir s'il existe des plans anciens de ce secteur d'avant la construction de la voie ferrée, malheureusement sans succès.
On peut supposer que la voie traversait en sifflet ce qui est devenu la voie ferrée entre la gare et le petit pont, car au Nord du petit pont piétonnier on peut encore suivre la voie jusqu'au débouché sur la SS Aurelia moderne.
Immédiatement à l'Est du pont se trouve une chapelle au n°19, et au sud de la voie ferrée une propriété dite St Gaetano. Selon Don Allaria Olivieri, la chapelle du même nom appartenait à la noble famille Galleani titulaire d'un « jus patronus » elle aurait été construite dans une période située entre 1712 et 1754. Il en est question dans deux rapports de visite pastorale.
Toujours selon Don Allaria Olivieri, une autre chapelle dite ND des Roses se trouvait également près de la voie romaine à proximité du terrain appartenant à l'évêché. Elle aurait été construite vers 1750 en remplacement d'une autre chapelle détruite au moment de l'élargissement de la voie.
Le Comte Galleani di Vintimiglia a indiqué au sujet de cette chapelle : « riguardo alle cappelle dedicate a S. Gaetano e a S. Anna volevo precisare che nell'archivio di famiglia non risulta che i Galleani possedessero la cappella di S. Gaetano (questo però non significa che sia una notizia falsa!) »
Plus loin au n° 7 on voit un beau porche restauré rappelant celui de la propriété Orengo et peut-être du XVIIème siècle.
Toutes ces mentions d'édifices anciens ne sont pas une preuve du tracé de la voie mais une présomption.
De là on imagine que la voie devait remonter vers la porte Canarde. Immédiatement à l'Ouest de celle-ci on voit une amorce de chemin très dégradé. Giordano et Lamboglia (24) page 13 et suivantes traitent des rapports entre Via Julia et Via Aurelia. et pensent que la voie descendait en pente douce de l'emplacement de la porte Canarde vers la plaine et ont exclu un tracé passant par le Castel d'Appio un peu plus au Nord. On peut se demander aussi pourquoi à l'Ouest de Vintimille la voie ne descendait pas directement vers l'étroite bande littorale au lieu de passer au dessus d'une falaise au niveau de cette porte Canarde, mais dans l'antiquité ce passage n'avait peut être pas la même physionomie et le terrain a pu s'ébouler depuis l'époque romaine. Thomas Hanbury a fait apposer sur la façade Ouest de la porte une plaque en marbre dont Giordano donne la traduction italienne page 163. Le texte ressemble à celui de la plaque qui se trouve au droit des jardins Hanbury à la Mortola.
Le texte est le suivant :
Reliquae medievale
Sopra la Romana Strada
Ora scomparsa
Perche rammento al viandante
Che qui passarano
Papa Innocenzo IV il 7 Marzo 1251
Nicolo Machaivelli nel Maggio 1511
Carlo V Imperatore nel Novembre 1536
Papa Paolo III nel Luglio 1538
E
Napoleone Bonaparte il 2 Marzo 1796
Mi volle ristorate
Il comm Tommaso Hanbury
MDCCCLXXXVII
A l'Ouest de Vintimille la dernière fortification extérieure de la ville est cette porte Canarda située sur la voie; la tour actuelle daterait du XIIIème siècle. Voir photos.
Par la route qui rejoint la SS via Aurelia avant Latte il y a environ 7 kilomètres entre la frontière et Vintimille. La route passe plusieurs fois en tunnel. Si l'on estime que le trajet par la Via Julia est un peu plus long, de l'ordre de 9 kilomètres environ faute de connaître le tracé complet et si la borne 594 se trouve à l'ouest de la Mortola il resterait 6 milles pour atteindre Vintimille soit un peu moins de 9 kilomètres ce qui rend plausible le fait que les deux bornes 590 placées dans l'église Saint Michel ne sont pas loin de leur emplacement sur la voie.
Pierre Bodard (9) page 134 note que "les deux bornes 590 ont toujours été vues dans la chapelle Saint Michel à Vintimille. Leur emplacement sur la Via Julia ne devait pas être éloigné de cet endroit."
La Via Aurelia entrait dans le vieux Vintimille si l'on venait de l'Ouest par le "passegio del fontanin".
Hilarion Spitalieri de Cessole (30) page 82 a donné également un certain nombre de références sur les auteurs qui ont étudié les deux milliaires 590 qui sont dans l'église Saint Michel de Vintimille.
En ce qui concerne la présence de bornes dans l'église saint Michel de Vintimille, René Alleau et Jean Paul Clébert (1), page 403, écrivent : « En 1883, on découvrit sous l'ancien maître autel de l'église de Roquebrune sur Argens, une borne milliaire.Une longue période d'insécurité avait succédé aux invasions des barbares.peu à peu les populations.se mirent à les adorer. Puis, l'Eglise prenant le dessus, les malheureuses bornes changèrent de sens : d'idoles, elles devinrent le réceptacle des génies malfaisants. Le seul moyen de les empêcher de nuire était de les placer dans un lieu consacré. Un très vieux texte conseille de les mettre sous la pierre de l'autel. »Theodorus Mommsen, historien allemand (1817-1903), a publié en 1877 un Corpus Inscriptionum Latinarum - Inscriptiones Galliae Cisalpinae Latinae souvent cité C I. L dans lequel il a recueilli de nombreuses inscriptions latines, principalement, avec des commentaires. En ce qui concerne certains milliaires il a accompagné les relevés de commentaires faits par des personnes qui les ont observés. (La mention rep = reperto). Un exemplaire de cet ouvrage en deux tomes se trouve à l'institut international d'études ligures de Bordighera (IISL), un autre au musée archéologique de Cimiez à Nice.
N° 8094 - Nella regione delle veglie ed alla pendice del monte detto volgarmento Ricart a cento settanta passi della strada carrozzabile che conduce da Monaco a Mentone verso la parte orientale sulla strada ancora oggi detta romana nel maggio del 1755 si sono trovate appogiate all parte settentrionale di detto monticello tre colonne, tutte tre ritte e poste a livello della strada romana ed in faccia del mezzogiorno. Di cui e stata trasportata a Monaco la prima, che trovavasi a destra delle altre due che ancora vi sono, verso la parte occidentale che conduce per la detta strada diritto all Turbia - Lanciarez 177 ms p 24.
N° 8095 - Due pezzi della medesima colonna - Lanciarez MS p 24
N°8097 - Bonifassi N° 23
N° 8098 - Nelle stessa campagna, praecedit N° 8099 - Ricolvi N° 24
N° 8099 - Mille passibus a Turbia Ric. Colonna spezzata in due parti, sulla strada di S. Rocco e Turbia ducente alla regione de Bestagni, ad un quarto d'ora da Turbia - Lanciarez MS p 23
N° 8100 - Rep a Turbia passibus CCC
AD ou ADAM = Archives départementales des Alpes Maritimes
BB = Bibliothèque Barbéra Barral à La Turbie 06
IPAAM = Institut de Préhistoire et d'Archéologie Alpes Méditerranée
IISL = Istituto internazionale di studie ligure - Bordighera Italie
A lire également
AA W Insediamenti e territorio: viabilita in Liguria tra I e VII secolo d.C (atti dei convegni, VII) Bordighera 2004
Chevalier R. les voies romaines ¨Paris 1997
Gervasini L. I resti ella viabilita romana nella Liguria occidentale, in Rivista Ingauna e Intemelia, XXXI-XXXII, 1976-78, PP 6-31
Lamboglia N., Pallarès F., Vintimiglia Romana (Itinerari Liguri 7), Bordighera 1985
Maestracci P. Les bornes routières romaines dans les Alpes Maritimes, in Archeam 8, 2000-2001 PP12-20