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Mise à jour 14 octobre 2007 Une des tours e

Murs à parements courbes

TOURS A GORGE OUVERTE


Mise à jour mars 2017

Les tours à gorge ouverte sont aussi appelées « tours ouvertes à la gorge ».

Une tour à gorge ouverte est une tour dans laquelle la partie intérieure à une fortification, à l'abri des attaques extérieures n'est pas entièrement construite.

Ainsi, à supposer que des assaillants  aient pris pied à l'intérieur d'une forteresse et occupent la tour en question et que des défenseurs puissent résister encore dans le reste de la forteresse, ils pourraient prendre à revers les occupants de la tour  qui deviendrait ainsi inutile.

Selon certaines sources, ce système aurait été importé du Moyen Orient par les croisés mais selon Viollet le Duc (), il existait déjà chez les romains. Malheureusement il ne donne pas ses sources à ce sujet.

Cependant il semble que le principe soit beaucoup plus ancien.

Christiane Desroches Noblecourt () présente une photo de la forteresse de Bouhen (Ouadi Halfa) avec des murs de briques de terre crue – Moyen Empire XIIème dynastie- Nubie 2ème cataracte près de la frontière du Soudan, et elle indique:

  « les murailles de cette forteresse de Bouhen étaient dominées par des trous crénelées et saillantes….

... des tourelles circulaires étaient  percées de meurtrières… ces ruines de briques ont actuellement disparu sous les eaux du lac Nasser… les très importantes ruines  ensevelies sous les sables ont permis au grand archéologue et architecte W.Emery d’exécuter une parfaite reconstitution de la forteresse»

Les plateformes des tours de l’enceinte extérieure étaient à la merci des tirs depuis l’enceinte principale. Sans être exactement des tours à gorge ouverte, elles pouvaient néanmoins  être attaquée depuis la forteresse principale.

Le principe des tours à gorge ouverte est subtil. Mais ce système pose plusieurs problèmes.

Il faut que la gorge ouverte soit absolument à l'abri des tirs extérieurs, ce qui implique l'incorporation de la tour dans une enceinte dont la conception ne permette pas ces tirs extérieurs, et suffisamment de recul pour pouvoir l’attaquer à partir de l’intérieur de l’enceinte fortifiée.

Structurellement ce type de tour est plus fragile qu'une tour fermée  et  nécessite un renforcement des parois en conséquence. Elle est également plus facile à démanteler qu'une tour classique.

J. C. Poteur () fait la distinction entre tour maîtresse et tour appartenant simplement à la fortification. S’il s’agit d’une tour maîtresse, c’est qu’elle appartient à la Couronne ou au Comté de Provence.

Ce type de tours est assez rare en Provence orientale et dans l’ancien Comté de Nice et l'on peut citer les exemples suivants :

Luceram 06440

Il s’agit d'un exemple de tour ronde. Ce cas est rare mais pas unique et une tour très importante  a été édifiée à Saint Jean dans la commune de Rougiers 83650 dans le Var. Photo de détail H. Guigues

Peille 06440

Selon PCAM () page 357,  « cet édifice en demi lune est la seule tour subsistant des nombreuses autres qui rythmaient le rempart de l’ancien castrum ».

S’agit il des deux tours du rempart qui ont été incorporées dans de habitations de part et d’autre de la route ?

Cependant un examen détaillé du donjon fait apparaître des remaniements qui semblent indiquer que la tour primitivement à gorge ouverte a été fermée par la suite

 

 

Saint Paul de Vence 06570

La tour ou porte royale datant du XIVème siècle à l’entrée du village au début de la Rue Grande, présente une ouverture côté village avec voûte en plein cintre

Saorge 06540

Photos Henri Guigues. Au dessus du château saint Georges, et sur la même arête se trouve le château des Salines ou château de Sales. On peut voir une tour carrée qui semble à gorge ouverte Cependant il y a lieu d'être très circonspect à ce sujet car il se pourrait qu'un des côtés de la tour se soit partiellement effondré

 

Tignet (le)  06130

Référence () page 118

Edmond Rossi () page 179, note « l’angle sud est de la construction forme le donjon à demi fermé à gorge ouverte »

Le castellaras du Tignet a été également étudié par G. Brétaudeau () pages 140 et 149.

Cependant l’examen sur place ne fait pas apparaître de tour à gorge ouverte de façon explicite et il n’y aurait eu que peu de recul pour la défendre. Certains murs de refend nord-sud ne sont pas fermés sur le côté sud dans l’état actuel et l’on ne voit pas trace d’éboulement

Bargème 83010

Photos Henri Guigues

Le Château des Pontévès de Bargème possède quatre tours rondes, une au moins est à gorge ouverte.

A l'extérieur en extension le grand donjon est carré et semble à trois murs? système ouvert ? ainsi qu'une tour de rempart à l'est

 

Fayence 83440

Un bel exemple de tour à gorge ouverte peut se voir dans le haut du village

Fréjus

Photos Hélène Garcia

Suivant Hélène Garcia  « deux tours à gorge ouverte ont été conservées à Fréjus. Elles appartiennent à la fortification médiévale (XIVème siècle) et sont de forme carrée. Elles possèdent toutes les deux une ouverture en arc brisé similaire à la tour du groupe épiscopal. L’une d’elles est visible de la place Formigé-Février, et l’autre au départ de la rueJean Jaurès (tour Loquès) , totalement prise dans les constructions modernes et couverte par une charpente »

Grimaud 83310

 

Photos Henri Guigues

Ce château a connu un certain nombre de propriétaires.

Il a  été démantelé au XVIIème siècle.

Des ouvertures de grandes baies ne correspondent peut-être pas à l'esprit d'origine.

Il est inscrit à l'inventaire de Monuments Historiques depuis 1928

Hyères 83400

Le château de Hyères a fait l’objet d’une étude dans le numéro 21 de la revue « châteaux forts d’Europe » consacré aux châteaux et tours à signaux des côtes de la Provence en 1323.

Photos Henri Guigues

Monsieur Boissin de l’association Hormigas de Hyères  a  inséré des documents sur le château de Hyères sur un site web : www.hormigas.net

 

Saint Julien le Montagnier 83950

Sur une photo signée Sophie Donsey pour Nice Matin on peut voir que la porte des templiers est une tour de ce type.

Rougiers 83650

Cette tour est au centre de la forteresse de Saint Jean et elle est du même type que celle de Luceram. cet exemple de tour ronde à gorge ouverte est très rare.

Photos Henri Guigues

Autres exemples dans le sud est de la France

Ces exemples ainsi que ceux qui sont cités dans des pays étrangers sont donnés à titre indicatif pour montrer l’extension dans l’espace de ce type de tours, mais ne constituent nullement évidemment un recensement

Il serait intéressant de voir s'il y a une corrélation entre les châteaux où peuvent se voir ces tours et l'occupation par les chevaliers de saint Jean de Jérusalem, ou de Rhodes.

A l'apparition de l'artillerie ce type de fortification était devenu obsolète. Les premiers boulets en fonte sont apparus dans la deuxième moitié du 15ème siècle.

Dans une lettre du 22 décembre 2002, le professeur Balard de l’université Paris I donne des références détaillées sur la forteresse de Soldaia, comptoir gênois de Crimée à l’est de Yalta, qui pourrait d’après des photos avoir comporté une tour à gorge ouverte.

 

 

Avignon 84000

Ces tours ont été étudiées par Viollet le Duc ()

Sisteron 04200

Les tours d’enceinte du XIVème siècle, vestiges de l’enceinte qui protégeait la ville, sont très bien conservées. Les remparts furent rasés au XIXème siècle, mais cinq des tours furent sauvées grâce à Prosper Mérimée. La tour de la Médisance a conservé son escalier intérieur.

Riez 04500

 

Exemples dans la Drome 24

 

La tour de Montbrun, qui sert d’entrée au vieux village, était à l’origine à gorge ouverte et a été fermée par la suite, ce qui a été fait aussi dans d’autres cas, Peille par exemple.

Carcassonne 11000

Le château de Carcassonne a fait l’objet d’une étude de A. Salamagne ()

Couvertoirade (la), la cavalerie dans l’Aveyron 12230

La tour qui se trouve la plus près de la porte sud, semble être à gorge ouverte dans la partie basse et surmontée par une partie fermée.

Isolabona (vallée de la Nervia, Ligurie, au nord de Vintimille)

La tour (donjon) au plus haut du château est généralement considérée comme fermée.

Cependant deux morceaux de murs semblent indiquer un appareillage fini et non deux pans partiellement  détruits.

On peut se demander quelle est la raison de ces deux parements finis.

 

Autres exemples en Italie

Des exemples en Toscane montrent que dans certains cas toutes les tours d’un village fortifié pouvaient être à gorge ouverte

Exemple en Espagne

Forteresse d'Artajona en Navarre

El Cerco

Vue extérieure et intérieure

 

Véliko Tarnovo Bulgarie

Cette tour  a été restaurée récemment

Citadelles du document Fino

J. F. Fino () a donné les plans de quelques réalisations du Moyen Age ;

En page 324 il montre en figure 87 le plan de Carcassonne suivant le plan de J. Girou. Ce plan fait apparaître un certain nombre de tours à gorge ouverte sur l’enceinte extérieure.

En page 339, sur le plan de la figure 95 d’après les relevés de Fr. Anus, on voit également certaines tours du même type sur l’enceinte extérieure.

En page 359, ce sont toutes les tours de l’enceinte extérieure qui seraient de ce type suivant le plan de van de Walle fig 104.

En page 395, deux tours de l’enceinte extérieure seraient aussi à gorge ouverte suivant le cliché des archives photographiques fig 121.

En Angleterre le château de Suffolk () semble avoir comporté des tours ouvertes d’après les reconstitutions faites.

Les tours  à chemise

Le château de Coucy (), page 45 et suivantes, avait un donjon formidable, et était entouré d’un  chemisage périphérique qui constituait une tour ouverte.. La chemise faisait 20 mètres de haut et 8,50m d'épaisseur à la base et était séparée du donjon par un profond fossé.

Le château de la Roche Guyon () en Normandie avait une double chemise.

Il n’y a pas d’exemple de telle construction dans le Var et les Alpes Maritimes. Cependant les tours à saillants procèdent d’un principe un peu semblable

Les tours à saillant

On peut rapprocher ce système de défense des tours à chemise en ce sens que le saillant améliore la qualité de la tour sur le côté exposé en déviant les tirs. Il pouvait s’agir suivant une précision de J. C. Poteur de tirs provenant soit de canons soit de machines antérieures à l’invention du canon, par exemple catapultes.

Le donjon du château de Villeneuve Loubet

Ce donjon est pentagonal et présente deux faces en pointe vers le côté extérieur, le côté intérieur ayant l’apparence d’une tour carrée. On pourrait penser que cette disposition aurait été conçue comme pour dévier les projectiles.

Bien qu’il ne s’agisse pas d’une tour à chemise, on retrouve la même disposition dans cette conception

 

 

La tour de la Madone à Villeneuve Loubet

Cette tour est voisine du château de Villeneuve Loubet

La tour de la Cruelle à Breil

Cette tour a été étudiée  (et restaurée) par J.M. Cordier (), qui fait en page 253 un rapprochement avec la tour major de Carcassonne.

La tour Sincaire à Nice

Sébastien Richard () page 45, mentionne à propos de la chapelle Notre Dame de Sincaire à Nice « ce lieu de culte tient son nom de la tour pentagonale – cinque angolare- qui constituait le bastion de défense nord est des murailles de la cité »

Les tours à murs adjacents renforcés

J. C. Poteur cite le cas de la tour de saint Blaise 06 ou deux murs adjacents sont plus épais que les autres et celui de Bargèmes 83 qui est triangulaire.

Dans les tours à saillants ou les tours à murs adjacents renforcés le sens présumé de l’attaque était défini.

La barbacane de Saint Blaise fait l’objet d’un dossier particulier

Bibliographie

Bernard Yves - Annuaire touristique et culturel des Alpes Maritimes et de Monaco – éditions Campanile

Bretaudeau Georges – Les enceintes des Alpes Maritimes, 1996

Cordier Jean Marcel – la tour médiévale de la Cruella à Breil sur Roya - MIPAAM Tome XLV 2003

Desroches Noblecourt Christiane, L’architecture et son héritage

Fino J. F., forteresses de la France Médiévale, Paris, éditions A. et J. Picard  1967

Montclos (Claude de) -  Mémoire des ruines  - Èditions Mengès

PCAM, Patrimoine des communes des Alpes Maritimes, éditions Flohic, 2000

Poteur J. C. Chargé de l’inventaire du patrimoine au Conseil Général des Alpes Maritimes

Richard Sébastien, Nice Historique, janvier mars 2004

Rocolle Pierre – Les fortifications – 2000 ans de fortification française

Rossi Edmond, les châteaux du Moyen Age en Pays d’azur, Alandis éditions 2003

Salamagne A. Fortifications royales de Carcassonne, Archéologie du Midi médiéval, centre d’archéologie Midi Languedoc la Cité 22 rue du Plô 11000 Carcassonne

Viollet le Duc – Encyclopédie médiévale - Interlivres